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La cheffe de la diplomatie vénézuélienne répond à John Kerry

Caracas, le 24 mars 2016

Monsieur le Secrétaire d’Etat,

J’accuse réception de votre courrier du mois en cours, en réponse à l’invitation que nous avons adressée, au nom de la République bolivarienne du Venezuela, aux Etats membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies, à participer au débat ouvert sur le « Respect des principes et des objectifs de la Charte des Nations Unies comme élément fondamental pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales », débat qui s’est tenu le 15 février dernier, lorsque nous avons assumé la présidence tournante de cette instance permanente de l’Organisation.

Lors de ce débat, nous avons réaffirmé notre aspiration fondamentale à faire des principes de la Charte des Nations Unies, rempart de l’état de droit international, une réalité unique et universelle entre tous les Etats.

Malheureusement, au-delà des bonnes intentions, l’évidence historique montre la dangereuse existence de pouvoirs factuels, ouverts ou subreptices, qui par des manœuvres à caractère belliqueux, financier, économique, psychologique, attentatoire à l’identité et même communicationnel, incitent à la haine et entravent la gouvernance démocratiquement choisie par mandat populaire exprimé par le vote.

Aujourd’hui le monde subit les conséquences des expressions terroristes et de la violence extrême, ainsi que de formes de guerre non-conventionnelles qui entravent le droit des Peuples à avoir une Patrie, à la souveraineté, à l’autodétermination et à la paix.

Le débat convoqué par le Venezuela avait pour objectif la promotion des postulats du droit international et la prévention d’expression de haine, d’intolérance et de violence qui portent atteinte à l’état de droit international.

Nous entendons que la seule voie pour conquérir la paix et la sécurité internationales est d’éviter les menaces, l’ingérence dans les affaires étrangères, les blocus territoriaux, économiques ou de l’information, ainsi que toutes les formes d’intervention qui malheureusement n’ont abouti qu’au regrettable résultat de millions d’êtres humains expatriés, agressés dans leurs illusions, dans leur dignité, dans leur droit à la paix et au développement.

Je saisis l’occasion pour vous réitérer, à vous et à votre gouvernement, que si l’égalité des Etats, principe essentiel contenu dans la Charte de l’Organisation des Nations Unies, était respectée par ceux qui historiquement ont abusé de la force, des mesures de coercition unilatérales et extraterritoriales, la conflictualité, la violence et la guerre n’auraient pas martyrisé des pays aussi dissemblables que le Vietnam, Cuba, le Chili d’Allende, en passant aujourd’hui par l’Irak, la Libye et la Syrie, parmi tant d’autres exemples dans la douloureuse histoire récente de l’humanité.

Ma Patrie, le Venezuela, est un exemple évident de cette agression, pour le seul fait d’avoir décidé de parcourir les larges voies de la démocratie participative bolivarienne et d’exercer son droit inaliénable à construire notre propre modèle politique et social, fondé sur l’inclusion, la lutte contre la pauvreté, l’éducation et la santé pour tous et les larges libertés civiles et politiques consacrées dans notre Constitution, l’une de plus modernes et des plus progressistes au monde.

Le chemin tracé par la Constitution bolivarienne et l’orientation du processus politique engagé par le Venezuela en ce nouveau siècle se traduisent nettement dans les indicateurs de développement humain, malgré le harcèlement d’éléments extrêmes locaux en coordination avec des centres de pouvoir internationaux qui ne tolèrent par l’implantation par la volonté populaire directe d’un modèle authentiquement démocratique et pacifique.

Nous avons été victimes d’atroces attentats terroristes, psychologiques, médiatiques et économiques, dont des attaques violentes contre des écoles maternelles, l’obstruction des voies de communication, la fermeture de ports, en réussissant malgré tout à maintenir la paix de la République et les droits civiles et politiques de nos concitoyens.

Monsieur le Secrétaire d’Etat, permettez-moi de vous conseiller respectueusement d’observer la réalité de votre pays, au moins dans l’étude critique du système politique des Etats-Unis réalisée par les professeurs des Universités de Princeton et de Northwestern, Martin Gilens et Benjamin I. Page, respectivement, Testing Theories of American Politics : Elites, Interest Groups, and Average Citizens, qui montrent que ce sont les corporations qui dirigent les politiques publiques et non les demandes et les besoins légitimes de votre peuple. Dans le même sens, sont profondément inquiétantes les déclarations de l’ancien président Jimmy Carter, qui joint sa voix aux critiques qui considèrent que la démocratie aux Etats-Unis a été séquestrée par une élite.

Respectueux de la situation intérieure de chaque pays, je n’insisterai pas sur l’impunité institutionnelle qui favorise les assassinats d’afro-descendants, d’indiens et de latinos, ni sur la cartélisation bien connue des entreprises de communication qui ont privatisé la liberté d’expression, ni sur la soi-disante séparation des pouvoirs publics qui ne se tient que par une corrélation de forces entre les deux seuls partis au pouvoir, en empêchant le pluralisme et la diversité politique et idéologique.

Au nom du respect que le Président Nicolás Maduro et son peuple exigent pour notre peuple, et parce que je crois fermement que toute forme de relation humaine doit se fonder sur le respect mutuel et la réciprocité, nous refusons aujourd’hui la charge interventionniste de votre lettre, ainsi que sa tendance obsessionnelle à assumer qu’il n’existe qu’une seule forme de pensée, sans prendre en considération les processus des peuples et en opposition avec les principes et les objectifs de la Charte de l’ONU.

La prorogation de l’Ordre Exécutif, signé par le Président Barack Hussein Obama quelques jours après la date de sa communication, porte atteinte à la Charte des Nations Unies et méconnaît la voix du peuple vénézuélien et des chefs d’Etat de l’Amérique Latine et d’autres région du monde qui ont expressément exigé la dérogation de l’affirmation aberrante qui considère le Venezuela une menace pour les Etats-Unis.

Il est regrettable que votre gouvernement n’admette pas d’autre forme de relation entre les nations que celle fondée sur une suprématie que notre Libertador Simón Bolívar a fermement refusée il y a presque 200 ans.

En ma qualité de Ministre pour les Relations Extérieures de la République bolivarienne du Venezuela, je vous invite très poliment, entre pairs, entre égaux, à vous adresser à la Patrie de Simón Bolívar dans des termes et des formes de respect, dépourvues de l’arrogance historique qui a caractérisé l’exercice du pouvoir dans votre pays, conformément aux principes et aux objectifs de la Charte des Nations Unies et du droit international, règles fondamentales des relations entre Etats souverains.

Delcy Rodríguez Gómez

Ministre

Source: http://www.ultimasnoticias.com.ve/noticias/actualidad/politica/delcy-rodriguez-envio-carta-a-john-kerry–atienda-.aspx

Source en français: https://latinoactu.wordpress.com/2016/04/11/la-cheffe-de-la-diplomatie-venezuelienne-repond-a-john-kerry/

La cheffe de la diplomatie vénézuélienne répond à John Kerry
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